L’Agence Nationale de Gestion du Microcrédit (ANGEM) affiche un bilan que sa directrice générale, Souad Bendjemil, qualifie de « réussite tangible » : depuis la création de l’agence en 2004, un million de projets auraient été financés, permettant la création de près de deux millions d’emplois. Ces chiffres, détaillés dimanche lors de l’émission L’invité du jour sur la Chaîne 3 de la Radio algérienne, positionnent l’ANGEM comme un acteur central du tissu économique local, en particulier dans les zones où l’économie informelle et le manque d’accès au financement freinent l’entrepreneuriat.
Un portefeuille de projets massif et un effet d’entraînement sur l’emploi
Selon Mme Bendjemil, les données de l’agence montrent que le million de bénéficiaires financés restent actifs : beaucoup d’entre eux participent régulièrement à des manifestations commerciales, salons et expositions organisés par l’ANGEM pour faciliter l’accès aux marchés et la commercialisation de leurs produits. Cette continuité d’accompagnement — financement initial, formations, et relais sur les circuits de vente — est présentée comme un facteur important de durabilité des entreprises créées.
Pour le seul premier semestre 2025, la directrice générale annonce que 11 000 projets ont été financés, signe d’une dynamique qui se poursuit. Ces nouveaux micro-projets contribuent, à plus petite échelle, au renouvellement des initiatives locales et à l’absorption du chômage, notamment chez les jeunes et dans les zones rurales.
Success stories et débouchés internationaux
L’ANGEM met également en avant des exemples concrets de réussite : sept bénéficiaires financés par l’agence ont participé à la Foire commerciale intra-africaine (IATF 2025), tenue à Alger en septembre dernier. Ces entreprises, actives dans des secteurs variés — production d’huile d’argan, savons naturels, pièces de rechange, fruits exotiques — ont conclu des contrats d’exportation d’un montant d’environ 3 millions USD vers des marchés africains comme le Mali, le Niger et la Mauritanie. Ces premiers contrats d’exportation illustrent la capacité de certaines micro-entreprises à franchir l’étape de la commercialisation à l’étranger et à s’intégrer dans des chaînes de valeur régionales.
Orientation vers l’économie verte : formaliser la collecte de plastique
Face aux mutations économiques et environnementales, l’ANGEM oriente une partie de son dispositif vers les filières de l’économie verte. Mme Bendjemil a souligné une tendance croissante : la collecte et la valorisation des déchets plastiques, activité qui se développe massivement mais reste majoritairement informelle. Pour remédier à cette informalité et structurer le secteur, l’agence a lancé un programme pilote visant à financer 1 000 collecteurs pour l’achat de tricycles destinés à la collecte des plastiques.
Au-delà de l’équipement matériel, l’ANGEM prévoit un parcours de formation pour ces collecteurs, en collaboration avec le ministère de l’Environnement et de la Qualité de vie, afin d’assurer le respect des normes environnementales et d’optimiser la valeur marchande des matières collectées. L’objectif déclaré est de raccorder ces acteurs aux unités de recyclage locales et nationales, transformant ainsi une activité informelle et précaire en une filière formelle, créatrice d’emplois stables et de matières premières pour l’industrie du recyclage.
Accompagnement : plus qu’un prêt, une stratégie d’intégration
La stratégie de l’ANGEM ne se limite pas à l’octroi de crédits. D’après la directrice générale, l’agence accompagne les porteurs de projet par des formations techniques et commerciales, les met en relation avec des marchés et leur offre un suivi post-financement. Cette approche intégrée vise à réduire les risques d’échec et à améliorer la pérennité des micro-entreprises — une condition essentielle si l’on veut que les emplois créés survivent au-delà de leur genèse.
Enjeux et perspectives : structurer l’informel, diversifier les filières
Le discours de Mme Bendjemil met en lumière plusieurs enjeux :
- Formaliser les activités informelles pour améliorer les revenus et les protections sociales des entrepreneurs ;
- Encourager les filières à valeur ajoutée, notamment celles liées à l’économie verte (recyclage, agroalimentaire, produits artisanaux) ;
- Renforcer l’accès aux marchés (locaux, nationaux, régionaux) pour permettre aux micro-entreprises de se développer et d’exporter.
L’ANGEM mise sur la coordination avec d’autres acteurs publics — ministères, chambres de commerce, instituts de formation — et sur des partenariats pour amplifier l’impact de ses interventions.
Le bilan avancé par l’ANGEM — un million de projets financés, deux millions d’emplois créés — témoigne d’un important effort d’inclusion financière et de stimulation de l’entrepreneuriat local. Toutefois, la durabilité réelle de ces emplois, la qualité des revenus générés et la transition effective de l’informel vers le formel restent des défis majeurs. Les initiatives récentes, comme le financement et la formation des collecteurs de plastique, montrent que l’agence cherche à répondre à ces défis en ciblant des activités porteuses et en insistant sur l’accompagnement technique. Reste à observer, au fil des prochains bilans, comment ces politiques se traduiront en revenus pérennes et en intégration réelle des bénéficiaires dans le marché formel.
L.R.



