Une dynamique nouvelle s’amorce pour l’inclusion économique des femmes en Algérie. Dans un geste fort en faveur de l’autonomisation féminine, le ministère de la Solidarité nationale, de la Famille et de la Condition de la Femme s’apprête à mettre en œuvre un décret exécutif inédit, destiné à financer les microprojets portés par les femmes au foyer. L’annonce a été faite ce mercredi par Mohamed Medal, directeur de la Protection de la Famille, au micro de la chaîne I de la Radio nationale.
Ce dispositif, actuellement en attente de publication au Journal Officiel, cristallise les engagements pris au plus haut sommet de l’État pour soutenir les femmes productrices, en particulier celles en situation sociale vulnérable. Il vient répondre à une nécessité économique autant qu’à une exigence de justice sociale : transformer les compétences domestiques, artisanales ou agricoles des femmes en véritables leviers de croissance locale.
Une vision présidentielle traduite en action sociale et économique
Depuis plusieurs mois, les réunions du Conseil des ministres placent la femme au cœur du projet national de redressement économique. Le Président de la République insiste sur l’importance de créer les conditions favorables à la participation des femmes dans l’entrepreneuriat, à travers un soutien institutionnel, des formations ciblées et la levée des obstacles bureaucratiques.
Le décret annoncé s’inscrit pleinement dans cette stratégie. Il prévoit une aide directe, non remboursable, comprise entre 80 000 et 100 000 dinars algériens, destinée à l’acquisition d’équipements essentiels pour lancer des activités à petite échelle. Il ne s’agit ni d’un prêt ni d’un microcrédit, mais d’une subvention directe allouée par les directions de l’action sociale au niveau des wilayas.
Cibler les talents invisibles pour une relance inclusive
Ce nouveau mécanisme ne s’adresse pas à une élite entrepreneuriale, mais à des femmes souvent exclues des circuits économiques formels. Les bénéficiaires potentielles devront répondre à plusieurs critères : être âgées de 19 ans et plus, sans revenu stable, responsables de famille, et disposant de savoir-faire professionnels ou artisanaux.
Les candidatures seront déposées soit physiquement auprès des directions locales de l’action sociale, soit via une plateforme numérique en cours de développement. Objectif : alléger les démarches administratives, souvent dissuasives, et rapprocher le dispositif des citoyennes dans toutes les régions.
Des activités ancrées dans le tissu local
Le décret identifie une série d’activités éligibles, soigneusement sélectionnées pour correspondre aux réalités régionales et aux préférences des femmes. Parmi elles :
- Les métiers de bouche et du textile : pâtisserie, fabrication de pâtes, couture, tissage, broderie ;
- Les savoir-faire traditionnels : travail du cuir, du bois, du verre, artisanat local
- Les activités agricoles et para-agricoles : séchage de fruits, extraction d’huiles, élevage.
Le choix de ces domaines n’est pas anodin. Il témoigne d’une volonté de valoriser les patrimoines immatériels locaux, tout en assurant la viabilité économique des projets à travers une demande existante, tant sur les marchés intérieurs qu’extérieurs.
Une commercialisation repensée pour briser l’isolement
L’un des apports majeurs du décret réside dans la structuration des circuits de commercialisation, souvent absents ou inefficaces. Le texte prévoit des accords de partenariat avec des hôtels, des chambres d’artisanat, des foires saisonnières (notamment les marchés de Ramadan), mais aussi des salons internationaux.
Cette ouverture sur des canaux institutionnels vise à offrir aux femmes productrices une visibilité réelle et des débouchés durables. Le ministère entend ainsi intégrer pleinement la production féminine dans les chaînes de valeur nationales.
Des garanties de transparence et un encadrement de proximité
Pour veiller à l’équité dans l’octroi des aides, le dispositif s’appuie sur un double mécanisme de contrôle :
- Des commissions de wilaya, présidées par les directeurs de l’action sociale, seront chargées d’évaluer les projets et de vérifier leur conformité.
- Des comités de proximité, opérant sur le terrain, réaliseront des enquêtes sociales et des visites pour confirmer l’éligibilité des bénéficiaires.
Ce travail de terrain permettra de cibler avec précision les bénéficiaires et d’éviter les détournements, tout en renforçant la légitimité du programme.
Former pour réussir : l’autre pilier du programme
Conscient que le financement seul ne suffit pas, le ministère annonce des partenariats en cours de finalisation avec :
- L’Agence nationale de soutien au micro-crédit,
- Le ministère de l’Économie de la connaissance et des start-up,
- Le ministère du Tourisme.
Ces accords visent à offrir aux femmes bénéficiaires des formations pratiques en gestion de projet, techniques de vente, marketing digital, et exportation de produits locaux. En parallèle, des campagnes de sensibilisation seront menées à l’échelle nationale, avec un accent particulier sur les zones rurales, souvent oubliées des dynamiques économiques.
Une politique de dignité et de confiance
À travers ce décret, c’est une vision plus inclusive du développement que l’État algérien entend faire émerger. Une vision où la femme, longtemps cantonnée à l’espace domestique, devient actrice à part entière du progrès économique, sans avoir à renoncer à ses racines ni à sa dignité.
En soutenant les femmes productrices, le gouvernement ne leur accorde pas une faveur : il reconnaît leur rôle fondamental dans la construction d’une économie plus juste, plus résiliente et plus humaine.
L.R.



