15.5 C
Constantine
mardi 28 octobre 2025

Déchets domestiques : Le filon d’or de la récupération

Must read

Dans un contexte mondial marqué par une urbanisation croissante, une démographie galopante et une consommation de masse, les déchets solides se multiplient de manière ininterrompue. En Algérie, comme ailleurs, la problématique des déchets domestiques prend une ampleur alarmante. Pourtant, au cœur de ce problème environnemental se cache un véritable potentiel économique : celui de la récupération des déchets, considérée aujourd’hui par beaucoup comme un filon d’or.

Une activité prometteuse mais anarchique

Depuis quelques années, un nouveau créneau porteur séduit une frange importante de jeunes Algériens : la collecte et la récupération des déchets ménagers. Cette activité, accessible sans formation poussée, constitue une source de revenus pour de nombreux jeunes, mais elle se développe de manière désorganisée et informelle, en dehors de tout cadre légal.

Mme Nawel Kahina Khelalfa, chercheuse en recyclage des déchets à l’Université de Blida, s’est exprimée à ce sujet lors de son passage à la Radio Chaîne II. Elle alerte sur les risques sanitaires et environnementaux liés à cette pratique anarchique. La collecte non régulée favorise la prolifération de nuisibles (rats, chiens errants, insectes), vecteurs de maladies contagieuses, en particulier dans les cités urbaines à forte densité.

« Un travail non régulé est une activité qui n’obéit à aucune norme d’hygiène, ni de sécurité, ni mesures sanitaires, ni couverture sociale », insiste-t-elle.

Elle appelle les pouvoirs publics à valoriser ce métier en l’intégrant dans un cadre juridique clair, à travers une organisation structurée, garantissant la protection des travailleurs et la salubrité des quartiers urbains.

Un enjeu de santé publique et de développement durable

La gestion désordonnée des déchets n’est pas sans conséquence : pollution des sols, décharges sauvages, nuisances olfactives, contamination de l’air et de l’eau. Au-delà de la santé, c’est aussi l’image et l’attractivité économique des villes algériennes qui sont en jeu.

Mme Khelalfa insiste sur la nécessité d’une réflexion globale et humaine. Elle rappelle que la collecte commence à la maison, et qu’aucun modèle étranger ne peut être appliqué sans adaptation culturelle et comportementale. Son laboratoire propose déjà une stratégie nationale élaborée par des chercheurs algériens, visant à instaurer une récupération saine, inclusive et durable, avec comme objectif ambitieux mais réalisable : le zéro déchet.

Créer de l’emploi tout en protégeant l’environnement

Face à un taux de chômage élevé chez les jeunes, cette filière peut devenir un levier important de création d’emplois verts. En régulant et en professionnalisant la récupération, l’État pourrait offrir des perspectives économiques durables, tout en engageant la société dans une transition écologique.

Mais pour réussir cette transformation, il faut sensibiliser la population, instaurer de nouvelles habitudes de tri et de gestion des déchets, et intégrer la question des déchets dès la conception des projets urbains, comme le souligne Mme Khelalfa.

Des techniques modernes et des exemples inspirants

À travers le monde, des pays ont montré qu’il était possible de transformer les déchets en ressources grâce à des techniques de récupération avancées :

  • En Suède, 99 % des déchets ménagers sont recyclés ou utilisés pour produire de l’énergie, via des usines d’incinération à récupération de chaleur, alimentant des milliers de foyers.
  • L’Allemagne excelle dans le tri sélectif à la source, avec une logistique performante de collecte et de transformation des matières (plastique, papier, verre, métaux).
  • Le Japon, confronté à un manque d’espace, mise sur une politique stricte de réduction à la source, de valorisation thermique, et de réutilisation dans l’industrie.
  • Même certains pays africains comme le Rwanda ou l’Afrique du Sud développent des systèmes de recyclage communautaires, intégrés aux politiques locales d’emploi et de propreté.

Ces modèles peuvent inspirer l’Algérie, à condition de les adapter aux réalités sociales, culturelles et économiques locales. L’objectif est clair : passer d’une gestion de crise des déchets à une économie circulaire inclusive et durable.

Le secteur de la récupération des déchets, longtemps marginalisé, se révèle aujourd’hui être une opportunité stratégique pour l’Algérie : réduction des nuisances, création d’emplois, amélioration du cadre de vie et protection de l’environnement. Mais pour en tirer profit, il devient urgent d’organiser ce secteur, de le légaliser, de le valoriser, et de former les jeunes qui y contribuent déjà. C’est à ce prix que le pays pourra transformer ses déchets… en richesse.

L.R.

- Advertisement -spot_img

More articles

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici

- Advertisement -spot_img

Latest article