Attirés par des prix très compétitifs et découragés par les obstacles européens, de nombreux Algériens se tournent vers la Chine pour importer un véhicule neuf ou d’occasion récente. Si cette alternative semble avantageuse, elle cache aussi son lot de mauvaises surprises. L’Association de protection et d’orientation du consommateur et son environnement (Apoce) tire la sonnette d’alarme sur les risques liés à ces importations. Arnaques, intermédiaires douteux, véhicules non conformes : enquête sur un phénomène en pleine expansion.
Face à la flambée des prix sur les marchés automobiles traditionnels, notamment en Europe, de plus en plus d’Algériens se tournent vers la Chine pour importer des véhicules neufs ou de moins de trois ans. Cette nouvelle tendance s’explique aussi par la difficulté croissante d’obtenir un visa pour la France et d’autres pays de l’Union européenne, rendant le marché chinois plus accessible et attractif. Mais si les prix y sont nettement plus abordables, l’opération d’importation n’est pas sans risques.
C’est ce que met en garde Mustapha Zebdi, président de l’Association de protection et d’orientation du consommateur et son environnement (Apoce), qui appelle à la vigilance face aux arnaques et aux pratiques douteuses qui entourent ce type d’importation.
Le choix de l’intermédiaire, une étape décisive
Le premier piège concerne le choix de l’intermédiaire qui va se charger d’acheter et d’acheminer le véhicule depuis la Chine vers l’Algérie. En raison des coûts élevés du transport maritime, certains opérateurs proposent de regrouper les commandes afin de partager les frais. Toutefois, tous ne sont pas dignes de confiance.
« En général, les personnes intéressées par l’importation ne peuvent pas se rendre en Chine. Elles s’appuient donc sur des intermédiaires, souvent basés localement, qui se chargent de l’ensemble de la procédure : sélection, achat, embarquement et livraison », explique Mustapha Zebdi.
Mais le président de l’Apoce alerte : « Il est impératif de bien vérifier l’identité et la crédibilité de ces prestataires. Il ne faut surtout pas faire confiance à des individus ou entreprises qui ne possèdent qu’une simple page Facebook, sans présence réelle ni activité vérifiable sur le terrain. »
Zebdi recommande vivement de privilégier les intermédiaires ayant une existence légale prouvée, des bureaux officiels en Chine ou en Algérie, et d’opter de préférence pour des opérateurs recommandés par des personnes de confiance ou des témoignages fiables.
Un contrat écrit, la meilleure garantie contre les mauvaises surprises
Au-delà du choix du prestataire, la sécurisation de l’opération passe aussi par la signature d’un contrat détaillé. Ce document doit stipuler noir sur blanc toutes les conditions de la vente : la marque du véhicule, ses caractéristiques techniques, le kilométrage exact, l’année de fabrication et celle de la mise en circulation, le prix définitif, le mode de paiement (comptant ou en plusieurs tranches) ainsi que le délai de livraison.
« Un point essentiel souvent négligé : un véhicule produit en 2023, mais qui n’a pas roulé, n’est pas considéré comme neuf. Il peut s’agir d’un modèle déstocké, stationné pendant des mois dans un entrepôt. Ce détail doit absolument figurer dans le contrat pour éviter les malentendus », insiste Zebdi.
Autre recommandation : exiger des photos et des vidéos récentes du véhicule avant tout engagement. Cela permet de s’assurer de l’état réel de la voiture et d’éviter les mauvaises surprises à la réception.
Méfiez-vous des paiements en espèces
Le président de l’Apoce insiste également sur l’importance du mode de paiement. Celui-ci doit impérativement se faire par voie bancaire, afin de laisser une trace officielle de la transaction. « Le paiement en espèces est interdit. En plus d’être risqué, il ne permet aucune réclamation en cas de litige », prévient-il.
Des cas d’arnaques de plus en plus fréquents
Les témoignages d’acheteurs floués se multiplient. Mustapha Zebdi évoque notamment le cas d’un retraité ayant économisé pendant des années pour s’acheter une voiture : il a finalement reçu un véhicule aux performances bien inférieures à celles promises. Un autre importateur, quant à lui, a vu son véhicule bloqué au port pour avoir refusé de payer un supplément imprévu exigé par son intermédiaire.
Plus grave encore, certains véhicules prétendument neufs se sont révélés être des modèles d’occasion maquillés. « Un véhicule affichant zéro kilomètre n’est pas forcément neuf. Il peut avoir été immatriculé, stocké, voire utilisé brièvement avant d’être revendu. Nous avons saisi les autorités compétentes à ce sujet et attendons toujours des réponses », explique Zebdi.
Importer un véhicule de Chine peut s’avérer être une opération avantageuse sur le plan financier, à condition de respecter certaines règles strictes. Le choix d’un intermédiaire fiable, la signature d’un contrat complet, le respect des procédures légales et la vigilance sur l’état réel du véhicule sont autant de précautions à prendre pour éviter les nombreux pièges.
La Chine est certes une destination prometteuse pour les importations, mais elle n’échappe pas aux dérives, surtout dans un marché en pleine expansion. « On a vu des gens arnaqués pleurer », confie Zebdi. L’Algérien désireux d’importer une voiture doit donc se montrer aussi prudent que rigoureux.
LR.