Grâce à une campagne de moisson bien lancée et à l’extension des surfaces agricoles irriguées, le pays veut s’imposer comme puissance agricole régionale. Le Sahara devient un nouveau front stratégique.
La campagne agricole 2024-2025 marque un tournant dans l’ambition de l’Algérie à assurer sa sécurité alimentaire. Selon Houda Djaâfari, experte et consultante en stratégie agricole, la saison de moisson a démarré plus tôt que prévu, notamment dans le Sud algérien, avec des conditions climatiques favorables et une organisation logistique renforcée. Plus de 1 200 moissonneuses-batteuses ont été mobilisées à l’échelle nationale, permettant une récolte efficace et bien encadrée.
Un objectif clair : l’autosuffisance céréalière
L’Algérie ambitionne de récolter 84 millions de quintaux de céréales cette saison, un volume record qui s’inscrit dans une stratégie de souveraineté alimentaire visant à réduire drastiquement la dépendance aux importations de blé.
Selon Mme Djaâfari, 1,23 million d’hectares ont été emblavés cette année, dont 40 % bénéficient d’irrigation complémentaire, un facteur clé pour augmenter les rendements, en particulier dans les régions arides et semi-arides.
« La stratégie nationale repose sur trois leviers : élargir les surfaces cultivées, introduire des technologies modernes et intensifier la production dans le Sud », souligne l’experte.
Le Sahara : un laboratoire de l’agriculture de demain
C’est dans le Grand Sud que l’Algérie déploie ses projets les plus ambitieux. Grâce à l’introduction de la mécanisation agricole, du matériel moderne et de l’irrigation par pivot, certaines exploitations sahariennes atteignent des rendements impressionnants, jusqu’à 80 quintaux par hectare, contre une moyenne nationale de 30 quintaux/hectare.
Ce résultat est aussi le fruit de la valorisation des terres inexploitées, de l’encadrement technique des agriculteurs, et de l’expérience acquise sur le terrain dans la gestion des cultures en milieu désertique.
Des partenariats stratégiques en cours
Consciente des atouts géographiques et du potentiel foncier du Sahara, l’Algérie mise sur des partenariats public-privé nationaux et étrangers pour développer une agriculture intensive et durable dans ces zones.
Parmi les initiatives majeures :
- La création de pôles agro-industriels sahariens dans les wilayas de Ouargla, El M’Ghair et Adrar ;
- Des accords avec des entreprises étrangères spécialisées dans les semences, l’irrigation intelligente et la mécanisation ;
- Le développement de zones agricoles intégrées destinées à la culture du blé dur, de l’orge et des légumineuses.
Ces projets visent à transformer le désert en grenier agricole, tout en respectant les équilibres environnementaux et en créant des emplois durables.
Une ambition continentale
Ce virage agricole permet à l’Algérie de se hisser progressivement parmi les premiers producteurs céréaliers du monde arabe et du continent africain. L’enjeu désormais est de consolider ces acquis, en investissant dans :
- La formation des agriculteurs,
- L’innovation technologique,
- L’amélioration des infrastructures logistiques (stockage, transport, transformation),
- Et le renforcement des filières de commercialisation locales et à l’export.
« L’agriculture n’est plus un secteur d’appoint. Elle devient un pilier stratégique de notre sécurité nationale et de notre développement économique », affirme Mme Djaâfari.
L.R.



