Douze jours de guerre ont suffi pour bouleverser l’équilibre stratégique, diplomatique et énergétique du Moyen-Orient. Entre les frappes américaines, la surenchère militaire israélo-iranienne, les gesticulations diplomatiques de la Chine, l’isolement de la Russie et l’impuissance européenne, le conflit révèle crûment l’ordre mondial tel qu’il est : brutal, asymétrique, et dominé par la loi du plus fort.
Le retour du chaos stratégique, version Trump
Le retour de Donald Trump au cœur de la politique étrangère américaine redonne à Washington son style diplomatique le plus radical. Depuis 2018 et la rupture de l’accord sur le nucléaire iranien, Trump a remplacé la diplomatie par la dissuasion, les discussions par les missiles, les alliances multilatérales par des pactes bilatéraux dominants.
En quelques jours, les États-Unis ont :
- Frappé des positions iraniennes, y compris en territoire iranien,
- Déployé des unités navales dans le Golfe,
- Mis en alerte leurs bases régionales,
- Et confirmé leur soutien militaire total à Israël.
C’est une démonstration de puissance militaire totale, qui relègue toutes les autres puissances à un rôle périphérique, spectateur ou supplétif.
Pékin paralysée, malgré son alliance stratégique avec Téhéran
La Chine, qui ambitionne depuis des années de devenir un acteur majeur au Moyen-Orient, notamment via sa médiation dans le rapprochement Iran-Arabie saoudite, se retrouve sidérée par la rapidité et la brutalité des événements. Malgré son partenariat stratégique avec l’Iran, ses appels à la désescalade n’ont eu aucun effet.
Les analystes chinois eux-mêmes s’alarment : la Chine a besoin d’un Iran stable pour ses importations énergétiques, pour sa stratégie anti-américaine, et pour ses projets régionaux liés aux Nouvelles Routes de la soie. Mais elle n’a ni le courage politique, ni les moyens militaires d’entrer dans le jeu de la confrontation directe.
L’Europe : impuissante, divisée, inaudible
Pendant ce temps, l’Europe se débat dans ses contradictions. Elle prône la paix mais reste dépendante des États-Unis. Elle défend l’accord nucléaire tout en n’ayant aucun levier pour l’imposer. Elle souhaite jouer un rôle mais n’en a ni la voix, ni l’unité, ni les outils.
Emmanuel Macron incarne à lui seul l’effort désespéré de l’Europe pour exister diplomatiquement. Multipliant les appels à la retenue, aux cessez-le-feu et à une relance du dialogue régional, le président français tente de porter la voix d’une “Europe stratège”. Mais, isolé, il n’est écouté ni à Téhéran, ni à Tel-Aviv, ni à Washington.
Le pétrole, baromètre fou d’un monde en crise
La guerre a aussi déclenché une tempête sur les marchés énergétiques. Dès les premières frappes, le prix du baril de Brent s’est envolé, frôlant les 100 dollars dans un climat de panique. Les géants pétroliers se frottent les mains… pendant quelques jours seulement.
Mais très vite, la tendance s’inverse brutalement : pas de fermeture du détroit d’Ormuz, pas d’effet domino régional, et surtout intervention musclée des États-Unis pour garantir la fluidité des exportations. Résultat : le pétrole retombe, parfois en dessous de son niveau d’avant-guerre. En douze jours, les marchés ont vécu une véritable douche écossaise, alternant l’euphorie des hausses et la stupeur des rechutes.
Pour les grands groupes pétroliers, la guerre n’a pas tenu ses promesses. La volatilité effraie plus qu’elle ne profite, les gouvernements parlent de plafonnement des prix, et la nervosité des marchés sape les marges attendues.
Un monde régi par la force, et non par le droit
En fin de compte, ces douze jours de guerre éclairent un déséquilibre global :
- Les États-Unis, par leur puissance de feu, dictent les règles.
- La Chine, malgré ses ambitions, est bloquée par sa prudence stratégique.
- La Russie est absente, engloutie par l’Ukraine.
- L’Europe parle, mais n’est pas écoutée.
- Les marchés, enfin, vacillent, cherchant un cap dans une mer géopolitique agitée.
Le retour du trumpisme marque le retour d’un monde post-diplomatique, où les armes précèdent les mots, et où seuls les acteurs prêts à frapper ont voix au chapitre. Les autres regardent – parfois indignés, souvent impuissants.



