La région d’Adrar, aux confins du sud algérien, est sur le point d’accueillir un projet hors norme, à la croisée de l’innovation technologique, de la coopération internationale et de la souveraineté alimentaire. Baladna Algérie, filiale du géant agroalimentaire qatari, vient de franchir une étape décisive avec la signature de 14 contrats d’une valeur globale de 500 millions de dollars, destinés à poser les fondations de la plus grande ferme laitière du monde.
Une ferme géante, un projet structurant
Ce projet de 3,5 milliards de dollars vise à établir, à partir de 2027, une mégaferme comptant 270 000 vaches laitières pour une production annuelle ciblée de 100 000 tonnes de lait en poudre, un produit stratégique pour l’Algérie, jusque-là massivement importé. L’ambition est double : réduire la facture d’importation et sécuriser l’approvisionnement du pays en produits laitiers.
Outre ses retombées économiques, le projet devrait générer 5 000 emplois directs, principalement dans les wilayas du Sud, contribuant ainsi au développement régional.
Une alliance stratégique avec la technologie allemande
Parmi les 14 contrats signés le 28 juillet dernier, le plus emblématique lie Baladna au groupe allemand GEA (Global Engineering Alliance), géant mondial de l’ingénierie industrielle. Ce partenariat représente l’une des commandes les plus importantes de l’histoire du groupe allemand, selon son PDG, Stefan Klebert, présent lors de la cérémonie de signature.
GEA interviendra dans la conception complète de l’usine et des infrastructures agricoles, apportant son expertise à travers ses divisions Liquid & Powder Technologies (LPT) et Farm Technologies (FT). L’entreprise, forte de ses 18 000 collaborateurs, livrera une panoplie d’équipements de pointe couvrant l’ensemble de la chaîne de valeur :
- Systèmes automatisés de traite,
- Installations de filtration, séparation et évaporation,
- Séchoirs par atomisation,
- Lignes de conditionnement automatisées,
- Unité de séchage verticale de 40 mètres de haut.
Cette offre clé en main fera de la ferme d’Adrar une référence mondiale en matière de production industrielle de lait en poudre, selon les normes sanitaires, techniques et environnementales les plus exigeantes.
Des vaches américaines, une gestion intégrée
Pour compléter son dispositif, Baladna Algérie a opté pour l’importation de vaches laitières des États-Unis, réputées pour leur haut rendement, ainsi que pour des technologies d’irrigation avancées en provenance également du continent nord-américain, afin d’optimiser la gestion de l’eau en zone saharienne.
Ce choix témoigne d’une volonté assumée de mobiliser les meilleures expertises mondiales pour garantir la réussite industrielle, sanitaire et économique du projet, dans un secteur aussi stratégique que celui de l’agroalimentaire.
Une contribution à la sécurité alimentaire nationale
Au-delà de sa dimension industrielle, ce projet s’inscrit dans la stratégie nationale de sécurité alimentaire et dans la volonté de réduire la vulnérabilité du pays aux importations massives de produits laitiers.
En intégrant des partenaires internationaux de premier plan, l’Algérie réaffirme son ambition de bâtir des filières structurées autour de la production locale, de l’innovation technologique et de la souveraineté économique.
Comme l’a souligné Mohamed Moutaz Al-Khayyat, président de Baladna :
« Nous sommes fiers d’attirer les meilleures expertises internationales pour réaliser un projet aligné avec les normes les plus strictes. C’est une étape clé vers l’autonomie laitière. »
Une vision cohérente avec la stratégie économique algérienne
Ce projet s’inscrit parfaitement dans la stratégie nationale de réduction des importations, en cohérence avec la politique gouvernementale de valorisation des produits locaux et de substitution aux importations. À l’image de la régulation stricte des opérations de commerce extérieur récemment imposée par le gouvernement, ce partenariat international piloté dans un cadre national reflète une volonté de souveraineté maîtrisée et choisie.
L’alliance entre technologie allemande, cheptel américain et ambition nationale pourrait bien faire du désert d’Adrar un nouveau centre de gravité de l’agro-industrie mondiale. Ce projet structurant, à la fois stratégique et symbolique, place l’Algérie sur la voie d’une autosuffisance laitière et d’une reconquête de son indépendance alimentaire, tout en ouvrant la porte à de futures exportations agroalimentaires à haute valeur ajoutée.
L.R.



