Suspendue entre ses ponts et ses siècles, Constantine avance comme une ville qui apprend à conjuguer le temps. Dans les plis de son rocher ancestral, une modernité neuve s’enracine sans renier la pierre, la mémoire ni le souffle des anciens. Cirta se réinvente, fidèle à son âme, ouverte à l’avenir.
Constantine vit actuellement une transformation sans précédent. Entre modernisation accélérée et préservation de son identité millénaire, l’antique Cirta s’engage dans un vaste chantier de mutation urbaine, économique et sanitaire supervisé directement par le président Abdelmadjid Tebboune. Fidèle à sa promesse de rester au contact du pays réel, le chef de l’État a effectué une visite marathon marquée par des inaugurations, des lancements de projets et une série d’annonces structurantes, touchant les secteurs clés du développement national.
Un nouveau souffle pour la santé
La visite a débuté par le domaine de la santé, symbole de la priorité nationale accordée aux services de pointe. Tebboune a officiellement lancé les travaux du nouveau Centre hospitalo-universitaire de Constantine, un projet colossal de 500 lits, 24 services spécialisés et 1 000 places pédagogiques, implanté sur 20 hectares. Pensé comme un pivot régional de la médecine moderne, ce futur pôle hospitalo-universitaire doit désengorger les structures existantes et renforcer le rôle de la ville en matière de soins avancés.
Le président a insisté sur une orientation claire : multiplier les pôles de santé spécialisés à travers le pays et bâtir une médecine d’excellence fondée d’abord sur les compétences nationales. « Le développement doit se faire avec les médecins algériens », a-t-il martelé, rappelant l’importance de former localement des spécialistes dans les disciplines les plus pointues.
Infrastructures : connecter, fluidifier, moderniser
La dimension infrastructurelle a constitué l’autre volet central de la visite. Tebboune a inauguré la bretelle reliant la RN3 à l’autoroute Est-Ouest, un ouvrage stratégique destiné à fluidifier l’accès à la métropole constantinoise et à renforcer son intégration au réseau national.
L’accent a également été porté sur les équipements sportifs, socle d’une stratégie globale tournée vers la jeunesse. À El Khroub, le président a lancé un complexe sportif aux standards internationaux, véritable village olympique comprenant un stade de 30 000 places, deux terrains d’entraînement, une infrastructure d’hébergement de 60 chambres, une piscine de 3 000 places, une salle omnisports de 2 000 places, trois terrains de tennis, un parking de 3 500 places, et un pôle énergétique autonome.
Cet ensemble, inédit à l’échelle régionale, doit servir de tremplin à la formation sportive et à l’accueil de compétitions d’envergure.
Logement : un pari économique et social assumé
C’est dans le pôle urbain de Sissaoui que la dimension sociale de la visite s’est exprimée avec le plus de force. Le président y a lancé deux programmes majeurs, à savoir 8 050 logements AADL 3, et 6 800 logements publics locatifs (LPL).
À cette occasion, Tebboune a réaffirmé la solidité économique du pays à travers le dynamisme du secteur du bâtiment. « Certains pensaient que le dossier de l’habitat allait être à l’origine de l’effondrement de l’Algérie, mais c’est le contraire qui s’est produit », a-t-il déclaré. Il a également mis en avant la souveraineté de la production nationale, rappelant que les nouveaux programmes sont désormais « quasiment algériens à 100 % » et enjoignant les walis à lever toutes les entraves bureaucratiques.
Réhabilitation du Vieux Rocher : un engagement patrimonial réaffirmé
Moment fort de la visite : la projection d’un documentaire sur la rénovation du Vieux Rocher, cœur historique et identitaire de Constantine. Comme il l’avait fait pour la Casbah d’Alger, Tebboune a insisté sur la nécessité de préserver ce patrimoine unique tout en modernisant les usages urbains.
Les travaux connaissent une accélération notable grâce à une enveloppe supplémentaire de 122 milliards de dinars, qui s’ajoute aux 37 milliards débloqués en mars dernier lors d’une visite ministérielle.
Le démarrage a été ralenti par un obstacle technique majeur : l’état dégradé des réseaux d’eau potable, dont le remplacement intégral était indispensable avant tout aménagement de surface. Désormais, quatre entreprises sont à l’œuvre pour refaire les trottoirs, poser un pavage traditionnel en pierres polies, et moderniser les réseaux d’éclairage, d’assainissement et d’adduction d’eau.
L’ambition affichée est claire : transformer la médina en un pôle économique, touristique et culturel, sans trahir son cachet ancestral.
Un nouveau bastion de la souveraineté sanitaire
Autre inauguration majeure : un complexe pharmaceutique ultramoderne de 27 000 m², dédié aux sprays respiratoires, aux médicaments ORL, aux capsules molles et, surtout, aux anticancéreux. Une installation stratégique qui crée plus de 500 emplois directs et consolide la politique de souveraineté sanitaire.
L’Algérie compte désormais 233 établissements de production, dont 138 spécialisés dans le médicament, couvrant 82 % des besoins nationaux. Les importations ont chuté de 1,25 milliard de dollars en 2022 à 515 millions en 2024, un recul spectaculaire rendu possible par cet essor industriel.
Le prochain défi consiste à produire localement les matières premières pharmaceutiques (API), avec des projets déjà engagés à Sétif, Batna et Médéa, et une entrée en service prévue d’ici fin 2026.
Un dialogue direct avec la société civile
La visite s’est conclue par une rencontre dense avec les acteurs locaux. Tebboune y a défendu son projet de synergie entre université et économie productive, soulignant la nécessité d’aligner la formation sur les domaines d’investissement porteurs, un terrain déjà fertilisé par l’essor des start-up. Il a également rappelé l’importance stratégique du projet minier de Gara-Djebilet, qualifié de réalisation historique consolidant la souveraineté économique hors hydrocarbures. Il n’a pas manqué, par ailleurs, de s’engager à accompagner tout projet culturel qui symbolise la grandeur et l’histoire de l’antique Cirta.
Une ville repensée entre héritage et projection
Entre mégaprojets modernes — CHU, village sportif, bretelle autoroutière, complexe pharmaceutique — et restauration méticuleuse du patrimoine, Constantine avance sur deux jambes : l’innovation et l’authenticité. La ville se redessine, ambitieuse et fidèle à son identité, prête à entrer dans une nouvelle ère sans renoncer à son âme.
L.R.



