Le dixième congrès annuel de la Société algérienne d’orthodontie (SAO), qui s’est tenu les 5 et 6 décembre à l’hôtel El-Aurassi à Alger, a mis en lumière une problématique longtemps négligée : le coût des soins orthodontiques et leur accès limité pour une partie significative de la population. Au-delà des conférences scientifiques et des échanges techniques, la question du remboursement des soins dentaires a dominé les débats, révélant une tension persistante entre patients, professionnels de santé et organismes d’assurance.
L’orthodontie : bien plus qu’une question esthétique
Pour Réda Lotfi Almi, président de la SAO et professeur à la Faculté de médecine d’Alger, l’orthodontie ne se limite pas à une amélioration de l’apparence. « La correction des anomalies dentaires, dès l’âge de 5 ou 6 ans, est cruciale pour prévenir des complications plus graves et garantir la santé bucco-dentaire de l’enfant », explique-t-il. Selon lui, la prise en charge sociale doit concerner non seulement les enfants, mais aussi les adultes, qui représentent une part croissante des patients en orthodontie.
Malgré ces impératifs médicaux, l’assurance sociale en Algérie ne rembourse actuellement pas les soins orthodontiques pour les enfants de plus de 12 ans. Le président de la SAO plaide pour un renforcement de la collaboration entre Caisses d’assurances et mutuelles, afin de réduire le coût final pour les patients, sans attendre une couverture intégrale par l’État.
Des soins de plus en plus chers
Le coût des appareils de correction dentaire demeure un obstacle majeur. Les dispositifs standards se situent autour de 100 000 dinars, tandis que certains traitements pour adultes ou techniques modernes peuvent dépasser 140 000 dinars. « Ces prix ne sont pas fixés par les professionnels eux-mêmes », précise Réda Lotfi Almi. Les orthodontistes sont eux-mêmes confrontés au coût élevé des dispositifs et au jeu de l’offre et de la demande sur le marché des équipements médicaux.
Cette réalité met en lumière une double pression : celle des patients, pour qui les soins restent financièrement lourds, et celle des professionnels, qui doivent concilier qualité des traitements et accessibilité économique.
Un secteur en maturation et ouverture internationale
Le congrès a également permis l’échange d’expériences et la présentation de nouvelles méthodes, avec la participation de spécialistes venus des États-Unis, du Liban, de France et du Brésil. L’orthodontie en Algérie, développée à partir des années 1980, a rapidement rattrapé son retard grâce à une formation universitaire renforcée et à une meilleure structuration de la profession. Aujourd’hui, les nouvelles générations de dentistes et d’orthodontistes sont plus nombreuses et mieux formées, capables d’intégrer les innovations internationales.
Les enjeux futurs
Au-delà de l’enseignement et de l’innovation, le congrès a été l’occasion de lancer un appel aux autorités publiques et aux mutuelles pour élargir la couverture des soins orthodontiques. La finalité n’est pas uniquement esthétique : il s’agit d’assurer un suivi préventif et curatif indispensable pour la santé bucco-dentaire, réduire les complications et encourager l’accès aux traitements dès le plus jeune âge.
Par ailleurs, renforcer la visibilité de la profession et attirer de nouvelles vocations restent des priorités. Selon Réda Lotfi Almi, faire connaître la spécialité et soutenir les jeunes talents est essentiel pour pérenniser l’orthodontie en Algérie et garantir un équilibre entre qualité des soins, coût et accessibilité.
En résumé, le dixième congrès de la SAO a mis en lumière un défi majeur : concilier excellence médicale, innovation et équité sociale dans un secteur où les coûts élevés menacent l’accès aux soins, tout en appelant à une action concertée des autorités et des mutuelles pour soulager patients et professionnels.
L.R.



