La lutte contre la corruption ne peut reposer uniquement sur les sanctions répressives, a affirmé ce dimanche Salima Mousserati, présidente de la Haute autorité de transparence, de prévention et de lutte contre la corruption, lors d’une journée d’étude organisée à l’Université Mohamed-Chérif Messaâdia. Selon elle, c’est par un travail de fond sur les mentalités, porté par l’éducation, la formation et la sensibilisation, que les sociétés peuvent espérer éradiquer durablement ce fléau.
Mousserati a insisté sur le rôle stratégique de l’université dans la construction d’une culture de probité. En tant que creuset du savoir et de l’éthique publique, l’université est appelée à initier une dynamique de changement à travers l’enseignement de valeurs comme la transparence, la responsabilité et l’intégrité. Ce rôle ne saurait être isolé : il doit s’inscrire dans une synergie entre établissements académiques, institutions administratives, organes de contrôle, société civile et médias.
« La lutte contre la corruption est d’abord une lutte contre l’indifférence et la complaisance », a-t-elle souligné, appelant à l’implication de tous les acteurs sociaux dans une approche collective et proactive.
Une stratégie nationale fondée sur l’éducation
Dans le cadre de la mise en œuvre de la stratégie nationale de lutte contre la corruption, l’Algérie s’est engagée à intégrer la sensibilisation, l’enseignement et la formation au cœur de son dispositif. L’objectif est de construire une génération de citoyens capables de reconnaître, dénoncer et prévenir les pratiques corruptives, aussi bien dans l’administration que dans la vie économique et politique.
Lors de cette rencontre, plusieurs thématiques ont été abordées, telles que la prévention dans les marchés publics, l’adaptation de la législation nationale aux conventions internationales, et le rôle des mécanismes de contrôle dans la consolidation de l’intégrité.
Hocine Fouzari, inspecteur général du ministère de l’Enseignement supérieur, représentant du ministre Kamel Beddari, a rappelé que l’Algérie fait partie des premiers pays à avoir ratifié les conventions internationales en matière de lutte contre la corruption. Il a salué la création de la Haute autorité comme un tournant décisif vers la mise en place d’une gouvernance plus éthique.
Pour sa part, la rectrice de l’université de Souk Ahras, Mme Noura Moussa, a rappelé que la corruption constitue un défi collectif, appelant à une conjugaison des efforts entre le monde académique et les institutions pour faire émerger une culture citoyenne ancrée dans la transparence.
Les leçons des grandes universités mondiales
À l’échelle internationale, plusieurs universités de renom ont intégré la lutte contre la corruption dans leurs politiques internes et programmes éducatifs. À Harvard, par exemple, la Kennedy School propose des formations spécifiques sur la gouvernance éthique et les systèmes de prévention de la corruption. De même, la London School of Economics inclut dans ses cursus des modules consacrés à la transparence publique et à l’analyse des politiques anti-corruption.
Par ailleurs, des universités comme l’ETH Zurich ou l’Université de Tokyo ont mis en place des comités internes d’éthique chargés de superviser les pratiques de recherche, l’intégrité académique et les conflits d’intérêts. Ces comités fonctionnent souvent en coordination avec des plateformes de dénonciation anonymes et des chartes de conduite qui encadrent les comportements aussi bien des étudiants que du personnel.
Ces mécanismes visent non seulement à prévenir les abus, mais aussi à éduquer la communauté universitaire à la responsabilité individuelle et collective. L’exemple de ces établissements montre que la lutte contre la corruption commence par la création d’un environnement de confiance, où l’éthique est intégrée à tous les niveaux de gouvernance.
Dans la lignée de ces expériences internationales, la rencontre de Souk Ahras a donné lieu à une série de recommandations. Parmi elles : le renforcement des contenus pédagogiques sur la lutte contre la corruption, la création de cellules universitaires d’observation et d’intégrité, ainsi que la multiplication des partenariats entre les universités et la Haute autorité.
L’ambition affichée est claire : faire de l’université algérienne un modèle de transparence, un incubateur de citoyens vigilants et responsables, et un acteur incontournable dans la construction d’un État de droit.
L.R.



