Face aux aléas des marchés internationaux, l’Algérie opte pour une politique économique prudente et structurée, fondée sur la maîtrise des dépenses, la régulation des importations et la diversification de ses sources de revenus.
L’Algérie poursuit un redéploiement stratégique de sa politique économique, misant sur une gestion plus rigoureuse et un contrôle accru de ses équilibres macroéconomiques. L’objectif est clair : protéger les réserves de change, contenir les déficits et renforcer la résilience de l’économie nationale face à la volatilité des prix du pétrole.
Avec environ 70 milliards de dollars de réserves officielles de change et un endettement extérieur quasi inexistant, la situation financière du pays reste confortable à court terme. Ces réserves couvrent près d’un an et demi d’importations de biens et services, un matelas qui sécurise temporairement l’économie. Cependant, cette stabilité repose encore en grande partie sur la performance du secteur des hydrocarbures, exposé aux aléas des marchés mondiaux.
Un premier trimestre sous tension : retour du déficit commercial
Malgré les efforts de redressement, les premiers signes d’une vulnérabilité persistante se sont manifestés au cours du premier trimestre 2025. Pour la première fois depuis 2020, la balance commerciale du pays a enregistré un déficit, évalué à près de 269,3 milliards de dinars, selon les dernières données de l’Office national des statistiques (ONS).
Un signal d’alerte dans un contexte marqué par des incertitudes croissantes sur l’évolution des prix du pétrole brut. L’État s’efforce donc de maintenir l’équilibre de la balance des paiements et de réduire le déficit budgétaire, deux conditions clés pour la soutenabilité des finances publiques à moyen terme.
Importations sous contrôle : le gouvernement serre la vis
Pour freiner l’érosion des réserves en devises et mieux contrôler les flux financiers sortants, le ministère du Commerce extérieur et de la Promotion des exportations a introduit de nouvelles règles strictes encadrant les opérations d’importation.
Depuis le 9 juillet 2025, toute entreprise, qu’elle soit publique ou privée, doit obligatoirement présenter un programme prévisionnel d’importation (PPI). Ce document, validé en amont par le ministère, est désormais indispensable pour toute domiciliation bancaire liée à l’importation de biens ou de services.
Une autre mesure forte est entrée en vigueur le 11 août dernier : les entreprises algériennes sont désormais tenues de domicilier leur programme d’importation auprès d’une seule banque. Une exception est toutefois accordée aux grandes entreprises, qui peuvent recourir à plusieurs banques, à condition d’en informer officiellement le ministère. L’Association des banques et établissements financiers (ABEF) a déjà transmis ces nouvelles directives à l’ensemble des institutions bancaires.
Ces mesures s’inscrivent dans le cadre d’un vaste audit lancé fin juin, ciblant toutes les opérations d’importation des entreprises algériennes. Objectif : lutter contre la fraude, renforcer la transparence et rationaliser les transferts de devises.
Diversification économique : une priorité stratégique
Dans cette dynamique, le gouvernement continue de miser sur le développement des secteurs hors hydrocarbures, en particulier l’agriculture et l’industrie, qui enregistrent des performances en amélioration continue depuis quelques années.
Les autorités comptent sur la bonne tenue actuelle des finances publiques pour accélérer les réformes structurelles, soutenir l’investissement productif et stimuler la relance. Il s’agit de créer un environnement plus favorable aux affaires, améliorer la compétitivité extérieure et accroître la part des exportations non pétrolières.
Les projections officielles tablent sur un excédent commercial de plus de 4,8 milliards de dollars d’ici la fin de l’année, malgré les turbulences du premier trimestre. Pour atteindre cet objectif, la discipline budgétaire et la consolidation des exportations diversifiées restent plus que jamais indispensables.
Un cap à tenir : discipline, réformes et anticipation
L’enjeu est double pour l’Algérie : maintenir les équilibres financiers actuels tout en construisant une économie moins dépendante des recettes pétrolières. Cela passe nécessairement par une gestion rigoureuse des dépenses publiques, une maîtrise des importations et une allocation plus efficiente des ressources financières vers des projets structurants et des secteurs à forte valeur ajoutée.
À terme, la santé financière du pays dépendra de sa capacité à stabiliser sa balance des paiements, véritable thermomètre de son interaction économique avec le monde, et à pérenniser la diversification de ses revenus à l’export.
En somme, l’Algérie amorce une nouvelle phase de gestion économique, fondée sur la rigueur, la prévoyance et la rationalité. Si les fondamentaux sont rassurants, le défi reste de transformer cette stabilité temporaire en un socle durable de croissance autonome et résiliente.
L.R.



