L’Algérie lance un Master inédit pour former ses ingénieurs à la guerre électronique et à la maîtrise des systèmes autonomes, un enjeu stratégique de souveraineté technologique.
L’Algérie fait un pas décisif vers la souveraineté technologique. Mardi, le ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, Kamel Baddari, a inauguré à l’Université des Sciences et de la Technologie Houari-Boumediene (USTHB) le premier Master national consacré aux systèmes de contrôle et de brouillage des drones.
Créé en collaboration avec l’École nationale supérieure des systèmes autonomes (ENSSA), ce programme pionnier ambitionne de former une élite scientifique et technique capable de concevoir, neutraliser et piloter les technologies associées aux aéronefs sans pilote.
La première promotion, composée de 30 étudiants issus des spécialités d’électronique, d’automatique et de télécommunications, bénéficiera d’une formation sur deux ans. À la clé, un recrutement direct au Centre de recherche en technologies industrielles (CRTI) et dans d’autres organismes stratégiques.
« Ce Master sensible vise à doter l’Algérie d’ingénieurs capables de maîtriser la technologie des drones, de la détection au brouillage, en intégrant intelligence artificielle, cybersécurité et électronique de défense », a précisé M. Baddari.
La guerre des drones : une révolution silencieuse
En une décennie, les drones sont passés du statut de gadget d’observation à celui d’arme décisive et industrie stratégique.
Selon l’Institut international d’études stratégiques (IISS), plus de 70 pays disposent désormais de drones militaires, tandis que plus de 30 États ont développé des capacités de guerre électronique capables de les neutraliser ou de les détourner.
Le marché mondial des drones, évalué à 34 milliards de dollars en 2023, devrait atteindre 90 milliards à l’horizon 2030, selon le cabinet Fortune Business Insights.
L’usage militaire en représente près de 65 %, porté par des conflits récents où les drones ont joué un rôle central : Ukraine, Gaza, Syrie, Haut-Karabakh, Libye… Ces théâtres ont démontré que le contrôle de l’espace aérien basse altitude est devenu une clé du rapport de force.
L’Algérie entre formation et maîtrise technologique
Pour l’Algérie, le lancement de ce Master ne relève pas du symbole, mais d’un virage stratégique.
Le pays développe déjà, via le CRTI et le ministère de la Défense nationale, des drones de surveillance, de reconnaissance et d’intervention légère. Ces programmes, souvent discrets, s’appuient sur des coopérations scientifiques avec des universités locales et des partenariats techniques ponctuels avec la Chine, la Turquie et l’Afrique du Sud.
La création de ce cursus vise à intérioriser les compétences nécessaires pour concevoir localement les technologies critiques : caméras infrarouges, systèmes de navigation, brouillage électromagnétique, intelligence embarquée, et protection des réseaux.
Le but affiché : réduire la dépendance aux importations et bâtir une capacité de dissuasion autonome.
« L’Algérie nouvelle investit dans les sciences et les technologies de pointe pour garantir sa souveraineté nationale », a insisté le ministre, évoquant une “génération de scientifiques patriotes au service de la sécurité du pays”.
Avec ce premier Master en systèmes de contrôle et de brouillage des drones, l’Algérie affirme sa volonté de lier formation, recherche et défense nationale.
L.R.



