Les Douanes algériennes tirent la sonnette d’alarme : près de 15 millions d’articles contrefaits ont été saisis depuis 2007. Ce chiffre, révélé lors d’un séminaire international sur la protection de la propriété intellectuelle tenu mardi à Alger, illustre l’ampleur d’un phénomène en expansion, notamment en 2025 où plus de 387 000 articles ont déjà été confisqués.
Placée sous le thème « Dangers et solutions dans la lutte contre la contrefaçon », la rencontre, organisée sous le patronage de plusieurs ministères, a réuni les Douanes, l’INAPI, l’ONDA et la délégation de l’Union européenne. Tous s’accordent sur un constat : la contrefaçon n’est plus une simple infraction commerciale, mais une menace sanitaire, économique et sécuritaire mondiale.
Selon Selia Hakimi, responsable à la Direction générale des Douanes, l’Algérie dispose d’un dispositif de plus en plus performant : système d’alerte automatisé, interventions sur requête ou d’office, et désormais un module informatique de traçabilité en temps réel. Depuis la création, en 2007, d’une structure spécialisée, les Douanes ont traité 778 demandes d’intervention, diffusé 584 bulletins d’alerte et saisi 14,9 millions d’articles suspects, principalement des pièces de rechange, chaussures, vêtements et accessoires.
Plus de 80 % de ces produits provenaient de Chine, les autres d’Émirats arabes unis et, dans une moindre mesure, de Turquie.
Mais la lutte ne saurait reposer uniquement sur les Douanes. « Elle doit impliquer les administrations, les titulaires de droits et les consommateurs », plaide Mme Hakimi, rappelant que la contrefaçon compromet la compétitivité des entreprises et met en péril la santé publique.
L’intelligence artificielle, nouveau vecteur de contrefaçon
Pour Toufik Bouzina de l’INAPI, l’Algérie s’est dotée d’un cadre juridique solide, mais l’application reste fragile face à la montée des ventes en ligne et aux nouvelles menaces générées par l’intelligence artificielle. « La contrefaçon freine l’innovation et peut soutenir indirectement des réseaux criminels », avertit-il.
L’ONDA, par la voix de Mehdi Delmi, alerte sur une « double atteinte au droit moral et patrimonial » : l’IA peut désormais s’approprier, transformer ou recréer des œuvres musicales sans autorisation. L’office développe en réponse des outils fondés sur l’IA et la blockchain pour tracer les créations et prépare la mise en place d’une Fédération africaine du droit d’auteur, destinée à mutualiser les bases de données et défendre les spécificités culturelles du continent.
Enfin, Selipe Palacios Sureada, représentant de l’Union européenne, a rappelé le coût humain de la contrefaçon : des milliers de décès dus à des produits sanitaires falsifiés. Il appelle à un renforcement de la coopération régionale et internationale, notamment en Afrique, où la contrefaçon menace directement la santé publique, la sécurité et le développement économique.
En filigrane de cette mobilisation, un message clair : la contrefaçon est désormais un enjeu global qui appelle une riposte collective, à la croisée du droit, de la technologie et de la conscience citoyenne.
L.R.



