Accompagné d’une délégation record de 1 000 personnes, le prince héritier saoudien Mohammed Ben Salman (MBS) effectue sa première visite officielle à la Maison Blanche depuis sept ans, mardi 18 novembre. Cette rencontre pourrait, selon certains analystes, « tracer la voie pour les quatre-vingts prochaines années » dans les relations bilatérales entre Riyad et Washington, coïncidant avec le 80e anniversaire du « pacte du Quincy » signé en 1945 entre le roi Abdelaziz et le président Franklin Roosevelt.
Retour en grâce sur la scène internationale
Jeune dirigeant prometteur lors de sa visite en mars 2018 sous l’administration Trump, MBS arrive cette fois avec une stature affirmée sur la scène régionale et internationale. Le meurtre du journaliste Jamal Khashoggi en octobre 2018, attribué au prince héritier par la CIA, avait terni son image, mais son isolement diplomatique est désormais révolu. La rupture de l’embargo de facto par l’administration Biden en 2022, face à la flambée des prix du pétrole provoquée par la guerre en Ukraine, a permis à MBS de retrouver sa place dans le jeu géopolitique.
Lors de son récent déplacement, Donald Trump lui avait réservé sa première visite à l’étranger, soulignant leur relation personnelle et ouvrant la voie à des promesses d’investissements massifs. Aujourd’hui, le prince héritier vise à réaffirmer que la sécurité de l’Arabie saoudite demeure intrinsèquement liée aux États-Unis, en particulier dans un contexte régional instable.
Technologie et sécurité : un choix stratégique
Le président américain s’est montré plus disposé que son prédécesseur à envisager le transfert de technologies stratégiques, notamment dans le domaine de l’intelligence artificielle. Un exemple frappant est l’investissement annoncé par Cheikh Tahnoun Ben Zayed Al Nahyan des Émirats arabes unis : 1,4 trillion de dollars sur dix ans dans la Tech américaine. MBS entend suivre cette voie pour sécuriser des technologies de pointe et renforcer la protection de sites stratégiques vitaux.
Ni la Chine ni la Russie ne sont au centre de cette stratégie sécuritaire. Bien que Pékin demeure un partenaire économique important, il n’est pas envisagé comme garant de la sécurité. Quant à Moscou, son influence régionale a été durablement affectée par la guerre en Ukraine, malgré le narratif victorieux de Vladimir Poutine, souligne le Dr Saleh Al Khaltan, expert en relations russo-saoudiennes à la King Saud University.
Garanties de protection et enjeux régionaux
MBS cherche également à se prémunir contre de nouvelles attaques contre les installations stratégiques saoudiennes, comme celles des Houthis à Khuraïs et Abqaiq en septembre 2019, et les frappes israéliennes contre le Qatar en septembre 2025. Dans ces deux crises, l’administration Trump s’était abstenue d’intervenir directement, renforçant la nécessité pour Riyad de sécuriser un soutien solide auprès de Washington.
L’objectif du prince héritier est clair : consolider l’alliance avec les États-Unis, garantir la sécurité énergétique et militaire du royaume, tout en positionnant l’Arabie saoudite comme un acteur incontournable au Proche-Orient. Cette visite pourrait marquer un tournant dans la stratégie saoudienne et redéfinir l’équilibre régional pour les années à venir.
