Un tournant stratégique pour la santé publique en Algérie vient de s’amorcer à Constantine. Le groupe pharmaceutique public Saidal a signé un accord de partenariat majeur avec le géant chinois Truking pour la construction d’une usine de production de médicaments anticancéreux. Une première dans les relations bilatérales sino-algériennes dans ce domaine, et un signal fort de l’ambition nationale à renforcer sa souveraineté pharmaceutique.
Dans un pays où les traitements oncologiques importés pèsent lourdement sur les finances publiques et l’accès aux soins reste un défi pour de nombreux patients, cette usine représente bien plus qu’un projet industriel : c’est une infrastructure stratégique, à fort impact économique, social et sanitaire.
Une infrastructure de rupture à Constantine
Prévue dans la wilaya de Constantine, l’usine marquera un saut technologique sans précédent dans le paysage pharmaceutique algérien. Dotée des technologies de pointe du groupe chinois Truking, reconnu internationalement pour son expertise en automatisation et biotechnologie, l’unité de production vise à couvrir une part substantielle des besoins nationaux en traitements anticancéreux, tout en jetant les bases d’une capacité d’export à moyen terme.
La présence directe du ministre de l’Industrie pharmaceutique, Wassim Kouidri, lors de la signature de l’accord témoigne de l’importance accordée à ce projet, perçu comme l’un des piliers de la relance industrielle nationale post-Covid, dans un secteur hautement stratégique.
Avec l’augmentation constante du nombre de cas de cancer en Algérie — plusieurs dizaines de milliers par an selon les chiffres du ministère de la Santé —, l’accès aux traitements est un enjeu crucial. Jusqu’ici, le pays dépendait largement des importations, soumises à des tensions de disponibilité et à des coûts exorbitants.
L’usine de Constantine vient inverser cette logique : produire localement des traitements jusqu’ici considérés comme inaccessibles, réduire les délais de distribution, et surtout garantir une continuité thérapeutique pour des milliers de patients.
Le lancement récent du Pembrolizumab Saidal, un traitement innovant contre certains cancers, illustre déjà cette montée en puissance. Depuis le début de l’année, 22 000 doses ont été commercialisées via la Pharmacie centrale des hôpitaux (PCH), selon l’APS. Et ce n’est qu’un début : six nouveaux projets de médicaments anticancéreux sont en phase de développement.
Ce partenariat avec Truking consacre l’entrée de la Chine sur un nouveau terrain de coopération en Algérie : la production pharmaceutique. Jusqu’alors, les investissements chinois étaient concentrés dans les infrastructures, l’énergie et les mines. L’usine de Constantine ouvre ainsi une nouvelle frontière de collaboration technologique et industrielle.
Pour Saidal, il s’agit également d’une étape dans sa mue vers un acteur régional de référence dans le domaine des médicaments spécialisés. Cette coopération permet un transfert de savoir-faire, un accès à des plateformes technologiques de pointe, et une meilleure intégration dans les chaînes de valeur mondiales.
Au-delà des symboles, Constantine devient désormais un territoire d’excellence pharmaceutique, apte à répondre aux défis du XXIe siècle. Le projet s’inscrit dans une stratégie plus large de sécurisation des approvisionnements, de réduction des dépenses publiques en devises, et de valorisation de la compétence locale.
S.B.
