La protection de la biodiversité s’impose comme un enjeu majeur pour l’Algérie. Selon la Direction générale des forêts (DGF), plus de 1.200 spécimens appartenant à des espèces protégées ont été saisis au cours des six premiers mois de l’année, grâce à une action coordonnée entre la Gendarmerie nationale, la Police et les services des Douanes. Ce chiffre, révélateur de l’ampleur du trafic et du braconnage, illustre aussi la fermeté des autorités face à un phénomène aux ramifications locales et transnationales.
Des saisies massives et des réintroductions réussies
Parmi ces 1.200 animaux saisis, 420 ont été retrouvés vivants. La DGF précise que 357 d’entre eux ont déjà été relâchés dans leur milieu naturel, tandis que les blessés ont été confiés à des centres spécialisés pour soins, et les cadavres, soumis à autopsie afin d’affiner la connaissance des menaces pesant sur ces espèces.
Au deuxième trimestre, 141 animaux menacés ont été interceptés, dont 6 retrouvés morts (un fennec et cinq tortues grecques). Cette dernière demeure l’espèce la plus ciblée par les braconniers : 111 tortues ont été saisies à Sétif, dont 105 ont pu être réintroduites avec succès.
Les opérations ont également permis la libération d’un large éventail d’espèces, allant des oiseaux chanteurs (rossignols philomèles, mésanges charbonnières, bulbuls, rouges-gorges) aux rapaces emblématiques. À Bordj Bou Arréridj, un aigle royal a retrouvé la liberté, tandis qu’à Relizane, les autorités ont saisi six faucons crécerelles et une buse féroce.
Le cadre légal : un arsenal renforcé
La DGF rappelle que cette action s’inscrit dans un dispositif juridique robuste. Le décret exécutif 12-235 protège 374 espèces non domestiques, tandis que la loi 06-14 consacre la protection de 23 espèces menacées, parmi lesquelles plusieurs gazelles, la tortue grecque et l’outarde houbara.
Au-delà du cadre national, l’Algérie a renforcé ses engagements internationaux en ratifiant la Convention de Washington (CITES), qui encadre le commerce international des espèces menacées, ainsi que la Convention de Bonn sur les espèces migratrices. Ces instruments lient le pays à des efforts mondiaux contre le commerce illégal de faune sauvage, qui génère chaque année des milliards de dollars au profit de réseaux criminels.
Le cas préoccupant du singe magot
Parmi les espèces les plus vulnérables, le singe magot (Macaca sylvanus) occupe une place particulière. Primate endémique d’Afrique du Nord, il est présent notamment dans les forêts de Chréa, Cheffa, Bejaïa et Kharatta. Mais il est victime d’un double fléau : le trafic de bébés singes, souvent adoptés illégalement comme animaux de compagnie, et la dégradation de ses conditions de vie.
Devenus adultes, ces singes sont fréquemment abandonnés en raison de leur comportement agressif, rendant leur réintégration difficile. Leur régime alimentaire est également bouleversé par les habitudes humaines : autrefois nourris de glands, ils consomment aujourd’hui friandises, chips ou boissons sucrées offertes par les visiteurs, ce qui entraîne obésité, diabète et troubles comportementaux.
Un enjeu écologique et sociétal
Au-delà des chiffres, la lutte contre le braconnage interroge sur l’équilibre entre développement humain et préservation des écosystèmes. La DGF insiste sur la nécessité de sensibiliser les citoyens, notamment en matière de respect des espèces menacées et de comportements responsables lors des visites dans les parcs naturels.
L.R.



