L’Office algérien interprofessionnel des céréales (OAIC) a lancé un appel d’offres international pour l’acquisition de 50.000 tonnes de blé tendre. Une commande qui illustre la stratégie prudentielle de l’Algérie : profiter de la baisse actuelle des cours mondiaux pour constituer des réserves suffisantes et diversifier ses fournisseurs, tout en poursuivant ses efforts d’autosuffisance en blé dur.
Anticipation et sécurisation des approvisionnements
Selon Reuters, l’appel d’offres porte sur 50.000 tonnes métriques, mais l’Algérie achète souvent bien davantage que le volume initialement annoncé. Ses besoins annuels s’élèvent à près de 9 millions de tonnes de céréales.
La date limite des offres est fixée au 23 septembre, avec une validité jusqu’au 24. Les livraisons prévues s’échelonneront entre novembre et décembre pour l’Europe, et dès octobre pour les origines plus éloignées.
Pour Alger, il s’agit non seulement de couvrir les besoins immédiats, mais aussi de renforcer les stocks stratégiques. Le gouvernement entend se prémunir contre toute volatilité future, notamment liée aux tensions climatiques et géopolitiques, en profitant d’une fenêtre favorable des prix.
Une conjoncture internationale à l’avantage des acheteurs
Sur Euronext, la tonne de blé évolue autour de 190 €, un prix plancher alimenté par l’abondance de l’offre mondiale. L’USDA estime la récolte 2025-2026 à 809 millions de tonnes, grâce à des conditions favorables en Russie et en Chine.
Cette dernière, avec des stocks colossaux et une récolte record, a réduit ses importations, contribuant à maintenir les prix bas. En Europe, et particulièrement en France, les producteurs souffrent : une récolte de 33 millions de tonnes est attendue, mais les faibles cours grèvent les revenus. L’absence de l’Algérie, ex-premier client du blé français, accentue cette pression.
Cap sur l’autosuffisance en blé dur
Si le pays reste importateur net de blé tendre, la stratégie est différente pour le blé dur, utilisé dans les pâtes et le couscous. Près de 80 % de la demande nationale est désormais couverte par la production locale.
Un programme ambitieux de modernisation est en cours : construction de silos pour 9 millions de tonnes, appui aux producteurs via des semences certifiées, engrais subventionnés et prix incitatifs. Les régions du Sud, de plus en plus impliquées, assurent déjà 10 % de la production nationale. Des partenariats étrangers, comme avec l’italien Bonifiche Ferraresi, accompagnent cet essor.
Vers une agriculture plus résiliente
Pour Yacine El-Mahdi Oualid, nouveau ministre de l’Agriculture, il faut désormais franchir une étape supplémentaire en misant sur une « agriculture intelligente », alliant savoir-faire international, innovation technologique et valorisation des ressources humaines.
L’enjeu est double : renforcer l’autonomie alimentaire nationale et réduire la vulnérabilité aux chocs externes. Si le pain reste tributaire du blé tendre importé, la constitution de stocks conséquents à des prix compétitifs permet d’assurer la stabilité à court terme, tandis que l’investissement dans la production locale prépare l’avenir.
En misant à la fois sur l’anticipation des achats à bon prix et sur l’autosuffisance progressive en blé dur, l’Algérie se dote d’un double rempart face aux aléas du marché mondial.
L.R.